28 juin - 28 juillet 2025

 

Daboulistan

Vernissage
Samedi 5 juillet à 17h

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Raoul Philly (Benur) est né en 1998 à Lyon et a grandi dans le IXème arrondissement. Durant son adolescence il traîne dans ce quartier aux allures Pop qui ne sera pas sans influence sur son travail. C'est aussi là, dans la rue, qu'il apprend à graffer.

 

Benur découvre le graffiti en 2013 au collège avec des amis. C'est une période d'expérimentation qui commence. Il dessine d'abord sur papier avec son ami d'enfance Brako. Mais l'espace de la feuille devient vite insuffisant, ils ont besoin de plus de place, ils doivent passer à autre chose. Une nuit ils peignent et recouvrent le mur d'entrée du collège. Le collège, de la cour en passant par les murs des couloirs et des salles de classe, est peu à peu submergé par leurs graffitis. L'école est leur premier atelier, leur espace de jeu personnalisé. Les deux jeunes adolescents ont trouvé un moyen de dire, une façon d'exprimer leur voix singulièrement et ce en repoussant les limites de l'institution. Il faut ensuite élargir le cercle, repousser les limites du soi, sortir de la cour et aller arpenter la rue. Benur fait parti des crews lyonnais TP (Tu penses), PLS (position latérale de sécurité) et SLF (super low frequency). Le graffiti en équipe le pousse à aller toujours plus loin, à découvrir de nouveaux spots et à observer les techniques et les styles des autres graffeurs. Pour faire connaître leur crew, les jeunes graffeurs étudient Lyon à la manière des grands stratèges. La ville est un territoire à conquérir qu'ils tentent de rendre aussi vivant que possible. Pour lui et ses partenaires le graffiti est aussi l'opportunité d'expérimenter l'interdit. Créer un espace intime dans l'espace public, marquer un passage et laisser une trace font parti d'une expérience sous le signe de l'adrénaline. Le graffiti est un sport, une discipline qui nécessite parfois des conditions extrêmes. Les spots les plus visibles des passants sont à la fois les plus dangereux à atteindre et les plus désirables. A travers le graff ils souhaitent animer la ville à leur image. Comment s'approprier et prendre part à l'espace collectif, rendre visible ce qui dans l'horizon du béton ne l'est plus ? Ils apposent ainsi leur couleur et leur forme sur les murs, les lettres deviennent des fenêtres qui ouvrent le regard sur l'architecture de la ville.

En 2019, après une arrestation, Benur change d'horizon et recentre son attention et son énergie dans un nouvel espace cette fois-ci intérieur : son atelier du IXème arrondissement de Paris. Son travail prend alors un nouveau tournant, il délaisse peu à peu le graffiti de rue et cherche une manière de peindre plus singulière.

 

 

 

Une ligne directrice semble le guider de manière obsédante, une ligne qu'il appelle lui même « l'amour des lettres ». Avec de nouvelles contraintes (plus de temps et le format défini de la toile) il s'essaye à d'autres techniques, il se consacre à la peinture et exporte l'utilisation de bombes et de markers sur des toiles de moyenne et de grande taille. Le travail sur toile traduit une volonté de connaître, plus en profondeur, les potentialités de la peinture, il travaille les textures avec des aplats de couleurs tantôt uni tantôt nuageux, il arrose la toile de peinture ou au contraire travaille des détails. Il mélange les effets et les textures des markers et de la peinture. Il laisse les lettres émerger et les gouttes de couleurs couler et se rencontrer. A l'aide de pochoirs, de sacs plastique, d'éponges ou de clés il applique, gratte, ponce et raye la matière. Il apprend aussi à perfectionner la typographie de ses lettres en recherchant insatiablement une certaine maîtrise de la taille, du style et de la couleur.

 

Le travail de Benur se situe à la jonction entre calligraphie et typographie. Il couche sur toile son propre lettrage issu de son imaginaire et essaye de trouver sa signature loin des mots des autres dans la même lignée que celle initiée par Guy Debord, Isodore Isou et d'autres avant lui. Alors que la forme des lettres est systématiquement invisibilisée dans nos usages quotidiens de lecture et d'écriture les toiles de Benur nous invitent à considérer à nouveau l'écriture comme un geste, un mouvement. En maniant ses propres lettres, en les déformant et en les retravaillant indéfiniment, Benur place son œuvre à la charnière entre le pictural et le langage. Loin des polices de caractères que nous sommes accoutumés à exploiter l'artiste invente son propre système de signes et tente de nous le rendre lisible.

 

L'esthétique des lettres de Benur est inspirée des affiches des années 70' : des couleurs vives et tranchées, une rondeur bubble et enfantine. Mais derrière cet aspect dynamique et coloré apparaît peut être aussi une tentative impossible de trouver sa signature et son signe. L’œuvre de Benur traduit une expérience diffractante, une tentative d'habiter l'espace, coûte que coûte.

 

Alexine Taddei

 

 

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